Fin des hostilités ?

Moshé Sharett et ‘Haïm Weizmann en 1949

De tous les officiers supérieurs de Tsahal, Dayan est à présent devenu le spécialiste numéro un des questions liées aux accords d’armistice. Le 9 juin 1949, il est nommé « délégué aux affaires liées à l’armistice ». Il commande les officiers israéliens affectés aux quatre comités mixtes israélo-arabes. Ces comités sont pilotés par quatre officiers de l’ONU, un pour chaque front : Egypte, Jordanie, Syrie et Liban. Dans le cadre de ses fonctions, Dayan reste en lien étroit avec les fonctionnaires du ministère des affaires étrangères, à commencer par le ministre lui-même, Moshé Sharett en charge des échanges diplomatiques avec les USA et l’ONU.

Moshé Dayan en négociation d’armistice avec les égyptiens

L’accord d’armistice avec la Jordanie inclut un paragraphe selon lequel Israël bénéficiera d’un accès libre au Mont Scopus et au mur occidental mais cet disposition ne sera jamais respectée par les jordaniens. Début août Dayan recommande à Ben Gourion d’agir par la force et de conquérir le quartier de Sheikh Jarrah qui verrouille la route vers le Mont Scopus, de prendre Latroum et de forcer un passage jusqu’au mur occidental. C’est la première divergence d’opinion qui se manifeste entre ben Gourion et Dayan et ce ne sera pas la dernière. Ben Gourion rejette totalement la proposition de Dayan. Il craint une reprise de la guerre et l’immigration massive des rescapés de la Shoah et des juifs des pays musulmans est à son paroxysme. La majorité des zones conquises étaient à présent désertes après que leurs habitants palestiniens aient été déplacés. Ben Gourion veut se consacrer à l’intégration des immigrants, à l’effort d’installation sur les terres abandonnées et à la crise économique qui menace de détruire tout ce qui a déjà été accompli. De son point de vue la page de la guerre est tournée. Dayan accepte la décision.

Durant cette période, Dayan est amené à défendre des positions belliqueuses lors de plusieurs débats qui se tiennent au sommet de l’Etat. Lors d’une réunion d’ambassadeurs et de délégués organisés par Moshé Sharett au ministère des affaires étrangères en juillet 1950, Dayan suscite la stupeur des participants. Dans le protocole il est écrit :

Dayan est d’avis que la première phase du processus de création d’Israël comme état indépendant n’est pas encore achevée, étant donné que nous n’avons toujours pas décidé si le territoire dans ses limites actuelles, représente son extension définitive. L’Etat doit déterminé si ses frontières actuelles nous suffisent et si elles resteront telle quelles à l’avenir. Il estime que notre époque est encore propice à des changements.

Moshé Dayan signe l’accord d’armistice avec l’Egypte le 24 février 1949

Dayan n’interprète pas les résultats de la guerre d’indépendance comme une sentence absolue et il n’abandonne pas ses aspirations à terminer le travail. De nombreux historiens utilisent ces paroles comme une preuve que Dayan aspire à la conquête de la Cisjordanie et à repousser la frontière d’Israël jusqu’au Jourdain. Dans les années 50 il est souvent arrivé que l’on pousse des propositions de conquêtes de la rive occidentale, mais elles ne furent jamais exécutées par crainte pour le sort de la garnison israélienne sur le Mont Scopus ou pour la survie du pouvoir hachémite et l’arrivée d’éléments hostiles dans la région. Finalement, Dayan accepte la politique de Ben Gourion de considérer le maintien des jordaniens en Cisjordanie comme la moins mauvaise des alternatives. Et quand il proposera une opération visant à modifier les frontières de l’Etat, cela concernera plutôt le front égyptien.

Huit années plus tard, quand Dayan met un terme à sa carrière militaire, David Ben Gourion lui adressera un courrier enthousiaste dans lequel il rappellera ses succès l’un après l’autre. A propos de son action à Jérusalem il écrira : « Tu as non seulement fait preuve d’une aptitude militaire de premier ordre mais aussi d’un intelligence politique et d’un sens de l’Etat hors du commun. Tu as démontré tes talents de diplomate au cours des négociations de l’armistice que tu as menées avec les représentants du roi Abdallah à Rhodes. »

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