Londres

Les parents de Ruth, très aisés, estiment que leur gendre a besoin de se cultiver. En guise de cadeau de mariage, ils offrent au jeune couple des billets pour l’Angleterre et un budget mensuel afin de leur permettre d’y étudier. Shmuel Dayan s’oppose à ce voyage. Selon sa conception conservatrice, un paysan sioniste n’a pas besoin d’un niveau de culture élevée et l’hébreu est absolument suffisant pour un nouveau juif suivant les traces de ses ancêtres. Mais Moshé ne tient plus compte de ses avis. Il a soif de connaissances et il se réjouit de pouvoir améliorer sa maîtrise de l’anglais. Ils embarquent en troisième classe à bord d’un navire à destination de Marseille, passent quelques jours à Paris puis arrivent à Londres.

L’intention première est que Moshé étudie l’anglais au cours des deux mois précédant le début de l’année scolaire, qu’il se présente aux examens du baccalauréat britannique et qu’il tente d’être admis pour des études agronomiques dans une université. La soeur du pro-sioniste Lord Melchett, invite le couple à séjourner dans sa propriété proche d’Oxford et lui facilite l’accès à des cours dans un des collèges de la prestigieuse université.

Une rue de Swiss Cottage à Londres
Une rue du Swiss Cottage à Londres

Le docteur ‘Haïm Weizmann, président de l’organisation sioniste mondiale, convainc le professeur Harold Laski d’accueillir Moshé à des cours de la London School of Economics. Le couple loue un chambre dans le quartier de Swiss Cottage. Ruth suit des cours particuliers d’hébreu et Moshé des cours particuliers d’anglais. Ruth se souviendra de ces premiers jours : « Assurément nous donnions l’image d’un couple extravagant. Nous nous obstinions à chausser des sandales malgré l’hiver européen; Moshé refusait de porter une cravate et je m’interdisais de m’habiller avec les robes que ma mère m’avait achetées dans les magasins les plus chics de Jérusalem.

Ne nouveaux horizons semblent se présenter à Moshé mais les choses ne se déroulent pas bien. Il se met à détester Londrès dès le premier jour. Ruth racontera : « Il voulait rentrer immédiatement à la maison. L’usage de l’anglais ne lui venait pas facilement, il soufrait du smog anglais, il ne supportait pas l’obligation de porter un costume pour paraître dans la bonne société et il se sentait étranger. » Par ailleurs les lettres en provenance de la maison l’accablent. La situation de la ferme familiale est médiocre et des évènements sanglants éclatent en Palestine. L’inquiétude et la nostalgie le gagnent. Il a commencé à suivre plusieurs cours à la London School of Economics et il a même été admis à des cours à Cambridge pour le reste de ses études, mais au bout de six mois il décide de rentrer au pays ; le voyage est un échec. Plus tard Dayan avouera : « Être en dehors d’Israël me pesait… l’anglais que j’apprenais me permettait de papoter. Je ne tirais rien de mes cours à la faculté d’économie. Les cours auxquels je participais ne m’intéressaient pas particulièrement… Ma présence à Londres ne produisait rien de bon. Je retournais à la ferme. Je voulais vraiment étudier mais cela n’a pas marché. »

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