Ra’hel Rabinovitch

Ruth et Moshé Dayan

Ruth, Moshé et un couple d’amis embarquent pour le port de Gênes. De là ils poursuivent leur voyage en Italie, en Suisse et en France. Ruth conservera un souvenir agréable d ce périple et raconta que leur amie s’intéressait beaucoup à l’art et ne renonça à aucun musée durant tout le voyage. « Moshé n’avait pas beaucoup de patience pour les musée mais il tint bon. » A cette époque les téléphones mobiles n’existaient pas et la chaine CNN n’émettait pas encore. La plupart du temps nos voyageurs sont isolés et Moshé apprécie d’être un peu libéré du joug des problèmes de sécurité qui l’ont accaparé au cours des derniers mois. Au bout  de deux semaines ils arrivent à Paris. Là Dayan rencontre Shimon Peres qui l’informe de ce qui se passe en Israël. Il apprend que Ben Gourion est alité et qu’il souffre d’un problème à l’oreille qui provoque chez lui des vertiges et qui l’obligent à resté couché pendant de longs moments. Mais surtout, depuis que les détails du contrat d’armement avec la Tchécoslovaquie sont connus, la tempête s’est levée en Israël. De toute part on exige une attaque préventive avant que les égyptiens ne reçoivent ces armements menaçants. Dayan rencontre le Chef d’État-major de l’armée française, le général Augustin Guillaume Il insiste auprès de son interlocuteur pour obtenir la livraisons d’avions Mystère, les seuls à pouvoir se mesurer avec les Migs russes, ainsi que des chars AMX13 équipés d’un canon moderne pouvant rivaliser avec les chars soviétiques bien que leur blindage soit plus léger.

Dayan ne peut pas terminer son voyage touristique comme prévu. Le 21 octobre il reçoit un premier télégramme de l’aide de camp de Ben Gourion : « Ce matin le Vieux s’est levé et sa première demande a été de te revoir. », suivi immédiatement d’un second télégramme : « le Vieux te réclame tout de suite. » Dayan qui avait l’intention de rentrer avec sa femme et ses amis avec un navire partant de Marseille, est obligé de les quitter pour s’empresser de monter à bord d’un avion pour Israël. Au cours du vol se déroule un épisode que Moshé lui-même décrira comme « l’évènement le plus important de sa vie privé. » Lors de l’escale à Rome s’installe à ses côtés une femme jolie, élégante, délicate, soignée et intelligente, épouse d’un avocat de Jérusalem. « Le Saint-bénit-soit-il qui unit les semblables dans le ciel, s’était donné beaucoup de mal sur terre pour nous faire nous rencontrer. » rapportera Moshé Dayan dans ses mémoires. Ra’hel Rabinovitch était assiste à l’extrémité de l’appareil mais un célèbre avocat qui était assis à côté de Dayan, lui propose de lui céder sa place plus agréable. « Je ne sais pas s’il s’est agit d’un coup de foudre » ajoute Dayan, « mais dès que je fis la connaissance de Ra’hel, il n’exista plus aucune autre personne avec laquelle je voulus autant me retrouver afin de partager mes joies et mes peines. Il semble que Dayan ne parla pas de cela avec Ra’hel pendant le vol. Elle même racontera :

Ra’hel Rabinovith devenue quelques années plus tard Mme Ra’hel Dayan

Moshé était à l’aise et agréable. Au à un moment donné im me demanda si j’avais un demi dollar car il voulait boire une bière. Moshé n’avait jamais un sous en poche. J’étais bien entendu impressionnée. A un autre moment il me dit que j’avais de jolies mains et me demanda si je faisais parfois des salades. Je répondis positivement et il ajouta : « épluches-tu également des oignons ? » Juste avant l’atterrissage, il me demanda s’il pouvait m’inviter à prendre un café un de ces jours. Je lui répondis que je l’inviterai volontiers à la maison. Alors il me demanda : « et tu poseras une nappe sur la table ? » C’était étrange mais je lui donnais mon numéro de téléphone.

Il semble bien que la distinction et l’élégance bourgeoise de Ra’hel l’impressionnent et s’opposent à l’attitude plus simple de Ruth.

Dayan a connu de nombreuses femmes dans sa vie mais il n’a connu que deux amours : Ruth dans sa jeunesse et Ra’hel à l’âge mur. Le chef de son bureau qui l’accompagna en mai 1956 lors d’un voyage éclair à Rome notera dans ses mémoires :

L’après-midi nous réussîmes encore à passer par la Via Babuino célèbre pour ses magasins de chaussures. À l’époque les sandales italiennes faisaient fureur en Israël; les sandales « bibliques » étaient déjà boudées par les femmes élégantes. Je remarquai que Dayan achetait trois paires de sandales de taille différente et qu’il demandait qu’elles soient emballées séparément. Je compris qu’il venait d’acheter non seulement une paire pour Ruth et Yael, mais aussi pour Ra’hel. Je me dis qu’apparemment c’était devenu une affaire sérieuse.

Image