Le cessez le feu se noie

Le navire Bat Galim dans un port égyptien

Au début de l’été surgit un nouveau sujet conflictuel avec l’Égypte : la question de la liberté de navigation par le détroit de Tiran. Depuis la guerre de 1948, le passage par le canal de Suez est interdit aux navires israéliens. Puis graduellement le passage est également fermé aux navires étrangers qui transportent du fret vers les ports israéliens. Le dossier revient régulièrement devant le conseil de sécurité mais l’Égypte ne pas en considérations avis du conseil qui considère que le blocus n’est pas légal. Fin 1954, le ministre des affaires étrangères tente de relancer le sujet en envoyant un navire de pêche israélien vers le canal. Dayan s’était opposé au projet car il s’attend à ce que les égyptiens stoppent le navire et il ne voit pas par quel moyen militaire il pourrait empêcher l’action égyptienne. Et de fait le navire Bat Galim est arraisonné et ses marins sont emprisonnés. Seule la pression internationale parvient à forcer les égyptiens à les libérer au bout de plusieurs semaines. Le navire est confisqué et l’opération se solde donc par un échec d’autant que la fermeture du canal devient une réalité de fait contre laquelle il n’y a plus rien à faire.

Les 5 éclaireurs et les aviateurs de l’opération Yarkon. A gauche, assis sur l’avant d’un véhicule, Moshé Dayan. Photo prise à la fin de l’opération à Eilat.

Les égyptiens  affirment ensuite que le bras de mer vers Eilat fait partie de leurs eaux internationales et qu’ils ont le droit en tant que belligérant d’interdire la navigation de navires en route vers Eilat. Le ministre de la défense Ben Gourion est convaincu qu’Israël ne pourra s’en sortir qu’en brisant militairement le blocus. Il ordonne de commencer les préparatifs en créant un port à Eilat et en affrétant des navires capables de naviguer depuis l’Afrique vers la Mer rouge. Tsahal commence à réfléchir à une solution militaire du problème qui se traduirait par la conquête de Sharm el-Cheikh. Pour cela Dayan envoie au début du mois de juin 1955 pour une mission de reconnaissance particulièrement audacieuse cinq officiers sur la rive orientale de la presque ile du Sinaï. Ils sont chargés de vérifier la possibilité de faire passer une unité motorisée dans la zone montagneuse et caillouteuse qui va d’Eilat jusqu’à la pointe sud du Sinaï. L’opération Yarkon est complexe, combinant la marine et l’aviation. Le 9 juin la petite équipe se pose sur une plage déserte dans les environs du village de pécheurs bédouins Dahab et progresse à pied vers le nord pendant trois jours en empruntant des chemins de traverse alors que des forces égyptiennes les poursuivent. Ils marchent la nuit et se cachent le jour. La liaison est maintenue avec eux grâce à un avion dans lequel a pris place le commandant de l’opération, et qui plane au-dessus d’eux plusieurs fois par jour. A la fin de cette expédition exténuante, cinq avions légers se posent sur un terrain repérés par les éclaireurs qui sont récupérés moins d’une heure avant l’arrivée sur place des égyptiens. Le commandant de la patrouille de reconnaissance, qui est le commandant du bataillon 51, le lieutenant Asher Levi, obtiendra avec ses quatre compagnons, une citation spéciale de la bouche du Chef d’État-major, dans son bureau.

Afin de permettre à d’autres unités d’accumuler de l’expérience au combat, Dayan décide de confier l’exécution de la conquête de Sharm el-cheikh à la brigade Guivati et non aux parachutistes. Mais finalement l’opération ne sera pas lancée car le port d’Eilat est inexistant, aucune circulation maritime n’est envisageable sur le bras de mer. En réalité il est encore impossible à Israël de percer le blocus égyptien. Le sujet reviendra à l’ordre du jour dans 6 mois.

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